Ayoye! Méchant cauchemar

Début du livre AYOYE! MÉCHANT CAUCHEMAR

Auteure : Véronique Veilleux

Yé ! L’année scolaire est finie ! Je suis enfin en vacances. Je suis tellement contente ! Deux mois de congé ! Plus besoin de me lever aux aurores pour aller à l’école. Plus de devoirs. Plus besoin de me coucher à dix heures les jours de semaine. J’attendais ce moment avec impatience depuis le début de l’année scolaire, mais maintenant qu’il est arrivé, je n’ai pas le cœur à la fête. Ma meilleure amie part en Europe tout l’été avec sa grand-mère, ainsi que ses chiens Princesse et Merlin. La chanceuse ! Même si je suis super contente pour Catherine, elle va beaucoup me manquer. Et mon frère Max aussi. La semaine dernière, lorsque nous soupions toute la famille ensemble, Max nous a annoncé que son amoureux et lui allaient déménager à Montréal dès cet été. Ils se sont d’ailleurs inscrits au cégep là-bas. Max et André se sont déjà trouvé un appartement à Montréal. Ils vont déménager au début d’août. Contrairement à moi, mes parents se sont réjouis pour mon frère. Ils ont même prévu aller visiter son nouvel appartement durant leurs semaines de vacances. De mon côté, plus son départ approche et plus j’ai le cœur en miettes. Max déménage dans trois semaines et je ne cesse d’anticiper le jour de son départ et le vide qu’il va laisser autant dans la maison que dans ma vie. Il va tellement me manquer.

— Envoye, viens-t’en la sœur ! fait Max. P'pa nous attend dans la voiture. Tu sais qu’il déteste arriver à Montréal à l’heure de pointe.

Quand je pense que Catherine passe son été en Europe pendant que moi, je passe mes vacances à Montréal chez ma tante. Si au moins Max venait chez ma tante avec nous. Mais non, il va passer les vacances dans son appartement. Max ramasse mes valises et va les porter dans le coffre de la voiture. Il s’assoit sur le siège arrière. Je prends place à ses côtés dans la minuscule voiture de mon père. Le siège de Jade prend énormément de place du côté gauche. On est tassés comme des sardines et comme on est en juillet, il fait horriblement chaud. Et mon père qui refuse de mettre le climatiseur sous prétexte que ma petite sœur va être malade. La route va être longue. Horriblement longue ! J’ai horreur des vacances en famille ! Je déteste aller à Montréal ! C’est pareil chaque année. On va toujours à Montréal ! Quand on ne va pas à Sainte-Catherine chez tante Françoise, on va chez Grand-mère à Brossard. Trois abominables semaines de vacances qui ne passent jamais assez vite à mon goût. Heureusement qu’il y a… qu’il y avait Max pour pimenter mes vacances ! Sinon, ce serait carrément interminable… comme quand Max était en centre d’accueil. Cet été-là, j’ai passé les plus affreuses vacances de toute ma vie. Cette année, je les ai encore plus sur le cœur ces vacances en famille. Ça me rend tellement triste de penser que ces vacances en famille seront les dernières avec Max.

— Devine qui va venir passer trois semaines à Montréal chez moi l’année prochaine, dit Max comme s’il lisait dans mes pensées.

 

CHAPITRE 2

Après un long trajet qui dure depuis plus d’une éternité, nous voici enfin arrivés à Montréal, dans le nouvel appartement de Max. C’est n’est pas trop tôt! Mes jambes sont en compote à force d’être ratatinées entre Max et le siège d’auto de Jade. Ça, c’est sans compter le gigantesque sac de sport de mon frère qui n’entrait pas dans la valise de l’auto et tous les jouets de ma petite sœur. Comment un aussi petit bébé peut-il prendre autant de place dans une voiture?

            — Tadam! dit Max en ouvrant la porte.

            — Wow! Mais c’est donc ben grand ! s’exclame ma mère en entrant pour faire le tour de l’appartement. Et c’est beau en plus. C’est tout illuminé par le soleil. Et… Et que dire de la vue sur le fleuve ! C’est… c’est magnifique !

— Tu parles d’un appartement magnifique ! dis-je sur un ton ironique, toujours plantée à l’extérieur. Regarde le plancher. C’est tout sale. C’est encore pire que ma chambre. Pourtant, tu chiales toujours que ma chambre est jamais assez propre. Pis là, tu trouves cet appart tout dégueulasse magnifique ?      

— C’est magnifique! Tu vas voir, Émilie, à quel point cet endroit sera encore plus magnifique quand on aura fait le ménage, dit-elle en m’amenant jusqu’au salon. Regarde ça! Ne me dis pas que c’est pas magnifique! ajoute-t-elle en pointant le splendide coucher de soleil sur le fleuve.

Ben oui, c’est magnifique ! Mon frère s’en va vivre à l’autre bout du monde et ma mère trouve ça magnifique ! Moi qui pensais que ça lui faisait de la peine de voir son aîné quitter le nid familial. Mais non, elle a presque l’air d’être contente de se débarrasser de Max ! Comment peut-elle être contente de savoir que son fils va vivre dans un pareil trou à rats ? C’est pire que l’ancien un et demi dans lequel vivait André avant sa dépression ! Je veux bien croire qu’André a besoin de voir du soleil pour l’aider à garder le moral, mais là, franchement, il y a des limites.

— Ton frère et André vont être tellement bien ici! enchaîne ma mère d’un ton rêveur. Cet endroit est si romantique… Max et André pouvaient pas trouver mieux pour se faire un nid d’amour tout douillet!

— Ils seront pas si bien quand ils n’auront plus les moyens de le payer…

— La sœur, dit Max, t’inquiète pas pour nous. Le condo est à un ami de p’pa. Tu sais celui qui est parti travailler en France?

Ah oui! Alain machin chouette. Professeur-chercheur spécialiste de Stendhal. Le Alain qui a la gentillesse d’héberger mon père chaque automne quand il vient à Montréal donner son cours sur la chanson québécoise. Il est peut-être gentil, mais c’est un vrai cochon ! Il aurait pu laisser l’appartement dans un état moins lamentable.

— Et puis, Émilie, comment tu trouves l’appartement de Max? demande mon père.

— Dégueu !

Sur ce, ma mère sort et revient avec une panoplie de produits nettoyants, des linges et une moppe. Mon père, Max et moi commençons à nettoyer l’appartement pendant que ma mère va reconduire Jade chez ma tante à Sainte-Catherine. Lorsqu’elle est de retour, ma mère nous aide à terminer le ménage. Quand je pense qu’en ce moment, Catherine se la coule douce à Paris pendant que, moi, je fais le ménage chez Max. J’aurais rêvé mieux comme vacances!